Vous aider à comprendre votre médecin et mieux vivre vos problèmes de santé
Dimanche 5 octobre 2014

A propos de l'auteur

Bonjour et bienvenue ! Je m’appelle Ludivine, je suis interne en médecine générale et future généraliste. A travers ce blog, j'aimerais à la fois vous transmettre l'essentiel des bases pour bien comprendre votre corps et vous aider à mieux apprivoiser la logique du monde médical.

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Avez-vous déjà pensé à devenir végétarien(ne)?

Je me suis récemment posée cette question devant l’évolution des messages sur l’alimentation. Avec la tendance “écologique” qui se fait de plus en plus jour, l’urgence de changer nos habitudes, de réduire les émissions de CO2 etc. j’entends de plus en plus souvent un message totalement inattendu par rapport à l’histoire de nos cultures : réduisez votre consommation de viande. Partant de cet effet de surprise, pourrait-on à l’extrême devenir végétarien sans risque pour notre santé ?

1. Être végétarien, qu’est ce que cela implique dans la pratique ?

Être végétarien, cela veut dire ne plus manger de viande, ni de poisson. Certains conservent les crustacés, d’autres non, mais tout le monde est d’accord sur le point que viande et poisson : non. Alors, est-ce difficile ? A la maison, pas vraiment, si vous gérez les courses ou pouvez influer sur les menus, pas de souci ! Le seul problème que vous allez rencontrer est : le restaurant. Beaucoup de restaurants ne proposent pas le moindre plat chaud sans viande ni poisson. Sélectionner un restaurant, nécessitera que vous étudiez la carte à l’avance ou bien que vous expliquiez au serveur votre problème. Avec de la diplomatie, rien n’est impossible. Au pire, invoquez une raison médicale (conseil : dites que vous avez une insuffisance rénale et que vous ne pouvez pas manger de viande ni poisson, ce qui est partiellement vrai), a priori le serveur ne cherchera pas plus loin, si c’est médical, il ne peut pas vraiment vous condamner…

2. Je ne risque pas d’avoir des carences si je deviens végétarien ?

Sur ce point, je dois dire qu’il y a divergence entre mes cours et ce qui semble être dans la réalité. Nos livres de cours, relativement simplifiés pour notre compréhension, ne sont pas très détaillés sur l’alimentation. Le problème, étant que par la suite, peu de médecins s’y intéressent spontanément, ils vont donc garder les a priori qu’ils ont eu par le biais de leurs cours, sans chercher plus loin. En conséquence, bon nombre de médecins pensent qu’une alimentation végétarienne = carences multiples… et bon nombre de citoyens, pensent la même chose !

Être végétarien n’entraine pas de carences en quoi que ce soit… si vous avez pris soin d’apprendre quelques règles de base : savoir ce qu’on mange et comment remplacer ce qu’on ne mange plus. En pratique, ce n’est pas si compliqué.

Première erreur à ne pas faire : ne pas remplacer ce qu’on ne mange plus !

Si vous décidez de tenter cette expérience d’arrêter de manger viande et poisson, il va falloir remplacer les protéines animales que vous n’avez plus, par des protéines végétales tout simplement. Et sans le savoir, ces protéines végétales, vous les consommez déjà, sans savoir qui elles sont. Il y a donc des repas où sans le savoir vous mangez des protéines végétales + animales, ce qui ne présente pas un grand intérêt pour votre corps, voire peut fatiguer vos organes à la longue.

Les protéines végétales sont les légumineuses. Il s’agit de toutes les plantes comestibles pour lesquelles le fruit est enveloppé dans une coque, telles que les lentilles, pois chiche, haricots, flageolets, petits pois, fève, soja. Peut-être en appréciez-vous déjà quelques unes. Dans la cuisine végétarienne, les viandes et poissons sont donc remplacées par ces produits et les différentes variétés disponibles sont loin de limiter les créations culinaires. De même les céréales (riz, blé, seigle, orge etc.) contiennent également des protéines végétales, vous avez donc l’embarras du choix.

Deuxième erreur : penser qu’être végétarien crée une carence en fer

Cette idée, très répandue chez les médecins, l’est beaucoup moins chez les végétariens. Pourtant, elle n’a pas lieu d’être, car la consommation d’œufs et de produits laitiers continue, ce qui représente une source de fer. De plus, les sources de fer sont vraiment très nombreuses dans la nature !

Les légumineuses et les céréales sont riches en fer (soja, lentilles, fèves, sésame, millet, avoine par exemple), ce qui valide largement leur utilisation dans le remplacement des viandes et poissons sans risque de carence, car consommées quotidiennement. Les fruits et légumes sont pour la plupart des sources de fer, ainsi que le gingembre et le cacao.

Concernant les femmes enceintes, végétariennes ou pas, leur taux de fer est surveillé, souvent bas pour d’autres raisons que l’alimentation, et elles seront facilement supplémentées ; il n’y a donc aucune incompatibilité entre végétarisme et grossesse… sous réserve bien entendu que la grossesse soit médicalement suivie pour veiller à son bon déroulement.

Attention néanmoins à éviter de consommer vin/alcool ou thé/café lors du repas ou après, cela diminue la capacité du corps à absorber le fer (chélation du fer) ; que l’on soit végétarien ou non… Accompagnez plutôt votre repas d’une source de vitamine C, pour augmenter l’absorption du fer par vos intestins.

Troisième erreur : penser que l’iode va manquer en l’absence de poisson

C’est une autre question que l’on peut se poser en faisant le choix du végétarisme. Par chance, l’iode ne se trouve pas que dans les poissons et de manière surprenante, la plupart des produits marins ne contiennent pas plus d’iode que les produits terriens.

En premier lieu si les crustacés ne sont pas exclus, vous pourrez vous fournir en iode par ce biais. Sinon, l’œuf contient également de l’iode (un œuf par jour quel que soit sont taux de cholestérol est tout à fait possible), les fruits et légumes (ananas frais, haricots, lait entier pour les plus riches en iode) ainsi que… les algues ! Le manque d’iode est donc un faux problème dans le végétarisme.

3. Ok, pas de risque pour la santé, mais il y a-t-il un intérêt pour la santé à arrêter viande et poisson ?

Cette question est encore quelque peu débattue dans mon esprit. Certes, je n’ai pas trouvé d’inconvénient médical à devenir végétarien, mais existerait-il un intérêt pour notre corps à se passer de viande et poisson ?

Sur le plan budgétaire, l’intérêt est clairement de pouvoir faire des économies, la viande et le poisson de qualité coûtant chers alors que les lentilles et autres légumineuses achetées en vrac, étant bien moins chères, faciles à conserver pendant des mois et tout cela, pour le même effet dans notre corps !

Sur le plan de la santé, mes diverses lectures, pas toujours scientifiques, mais plutôt tirées des expériences vécues de leurs auteurs, semblent toutes aller dans le même sens : on tombe moins malade lorsque l’on est végétarien. Cette constatation m’a quelque peu déroutée, car je ne vois pas vraiment le lien entre viande/poisson et maladies. Puis, j’ai pensé à deux choses :

- première constatation : si on ne mange pas de viande ni de poisson, on mange plus de légumes, de fruits et de légumineuses. Or, ces aliments sont bien plus riches en vitamines et minéraux, indispensables au bon fonctionnement du système immunitaire. Partant de ce postulat, une partie de cette meilleure résistance des végétariens pourrait être expliquée par un système immunitaire mieux armé, plus agressif et efficace vis à vis des envahisseurs tels que virus, bactéries etc. D’autre part, cela leur confèrerait un meilleur entretien cellulaire, car les vitamines et minéraux permettent toutes les fonctions de réparation, protection (cofacteurs) donc un corps en “meilleur état”.

- seconde constatation : viande / charcuterie (poissons je ne sais pas) sont associés aux maladies cardio-vasculaires, cancers et obésité notamment en raison de leur richesse en graisse. Ce postulat est clairement prouvé par de multiples études. Arrêter d’en consommer revient alors logiquement à abaisser son risque de développer ces maladies qui abaissent largement la qualité de vie, et sa durée. De plus, s’en suit une perte de poids non négligeable.

A partir de ces deux paramètres, il y a de mon point de vue un grand intérêt à se passer de viande et de poisson.

4. Devenir végétarien : un choix pour sa santé ?

Les végétariens ne sont généralement pas devenus végétariens pour leur santé… mais pour celle des animaux. Leur discours est que la nutrition des humains n’excuse pas la mort et le sort cruel réservé aux animaux qu’ils soit terriens ou aquatiques. Refuser de manger de la viande ou du poisson, c’est refuser de participer à ces morts gratuites. Si nous partons du fait que se passer de viande et de poisson n’entraine aucun risque pour la santé, oui, nous pouvons dire que la mise à mort de ces animaux devient carrément inutile.

Je pense que vous avez probablement dû voir ces reportages clandestinement tournés et qui dénoncent l’élevage en batterie, le manque de soin des animaux, leur alimentation totalement déstructurée et leur croissance anormale. En tant que médecin, je n’ai pu m’empêcher de noter les multiples pathologies créées chez ces animaux. C’est pour moi de l’ordre de la maltraitance physique : ils ne peuvent pas bouger à leur guise, et développent donc de l’arthrose, des rhumatismes, des douleurs osseuses probables, sans parler de la peur et du stress constants dans lesquels ils se trouvent, vu que leurs conditions de vie sont tout sauf naturelles. De plus, leur alimentation inadaptée doit leur causer des problèmes de transit, des pathologies dégénératives en raison des multiples apports en antibiotiques, hormones de croissance et j’en passe qu’ils reçoivent.

Poules d'élevage en batterie

Laisser souffrir des animaux de maladies que l’on soigne chez les humains et qui bénéficient de milliards d’euros de budget, ne m’apparaît pas comme une attitude très responsable de la part de l’Homme. Cela revient à infliger aux autres ce que l’on refuse pour soi.

5. Viande et autopsie, une histoire vécue

Durant l’été de ma cinquième année, un ami en stage dans le service d’anatomopathologie, m’a invitée à participer à des autopsies médicales. Il s’agissait de patients décédés à l’hôpital, et pour lesquels la cause du décès était un peu mystérieuse.

Passé la période où je me demandais si j’allais faire un malaise ou non (finalement ce fut non), je me souviens avoir été marquée par deux éléments : les outils utilisés pour l’autopsie étaient les mêmes que ceux que l’on peut trouver dans une cuisine à quelques détails près (la scie, le sécateur) et les organes une fois dehors avaient strictement le même aspect que ceux que l’on mange.

Un des patients présentant visiblement un épanchement pleural (liquide autour du poumon) l’anatomopathologiste prit une louche, en tout point identique à celle utilisée pour servir la soupe et se mit à compter le nombre de louches de liquide qu’elle récoltait et qui soi-dit en passant ressemblait étrangement à un bouillon de cuisine. Une fois la quantité de liquide évaluée, elle sortit les autres organes et nous demanda de les peser pour voir si leur poids était normal. Là encore, un drôle de parallèle s’est fait entre ces organes, notamment le foie, les reins, toutes ces choses qui se mangent et que l’on pesait puis découpait… comme à la boucherie. De même, l’aspect des muscles découpés créait une drôle d’association dans mon esprit.

Les jours qui ont suivi, je n’ai pas pu manger de viande ni quoi que ce soit qui y ressemblait. Et je dois bien dire que depuis, ce parallèle entre se manger et manger les animaux n’a pas tout à fait disparu… Je me verrai difficilement vous conseiller d’assister à une autopsie pour en prendre conscience, mais regarder quelques reportages sur la maltraitance des animaux que nous mangeons ne donne guère plus envie d’en consommer.

6. Alors, quand tentez-vous l’expérience ?

Après ce tour d’horizon, il n’y a à mon sens aucune raison d’avoir peur du végétarisme du point de vue de la santé. Nous avons vu que les risques de carence sont de faux a priori. Au-delà des avantages santé déjà vus concernant les maladies, les vitamines et minéraux, je note également une attitude responsable de ceux qui font le choix d’être végétariens.

Tout d’abord, pour être végétarien il faut être concerné et curieux de ce qui se trouve dans son assiette, savoir ce que l’on mange et ne pas se contenter de se mettre à table et d’avaler ce qu’il y a dans le plat ! Ensuite, c’est aussi découvrir des aliments dont on aurait jamais soupçonné l’existence, notamment les légumineuses, les multiples variétés de céréales (riz, quinoa, blé, avoine, sarrasin etc.) et légumes que l’on peut y associer.

Personnellement, j’ai trouvé dans mes recherches plus d’arguments que d’inconvénients (restaurants, société) à adopter ce mode d’alimentation. J’avais commencé il y a déjà plusieurs années à diminuer ma consommation de viande et poisson, en arrêtant d’en acheter et n’en mangeant qu’au restaurant. Une fois les produits pour les remplacer découverts par mes recherches, un simple tour en supermarché (ou mieux en boutique bio – plus de choix et de découvertes culinaires) ont suffit pour définir mes nouvelles habitudes alimentaires.

Et vous, qu’est ce qui vous retient ? L’idée vous avait-elle déjà effleurée ou avez-vous déjà tenté l’expérience ?

Pour vous aider : comment commencer ? avec l’AVF ; blog végétarien très pertinent (et végétalien); composition des aliments

Crédit photo : stock.xchng, Farmsanctuary



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95 Réponses de “Avez-vous déjà pensé à devenir végétarien(ne)?”

  1. aurelia dit :

    Bonjour,

    Je lis votre site internet avec avidité, étant devenue végétarienne. J’ai une inquiétude en ce qui concerne les protéines végétales, car j’ai peur d’être carencée, Effectivement, si on suit la reco de l’apport de 0,8g/kg/jour. il me faudrait 48 g de protéines par jour vu mon poids. Or les légumineuses, un des groupes le plus riche en protéines végétales s’avèrent moins riche que les protéines animales: les lentilles cuitent ont un taux de 8g pour 100g (beaucoup de sites internet induisent en erreur et indiquent le taux de la lentille crue: 23g/100g, sans preciser que c’est pour une lentille crue….), ce qui veut dire qu’il faudrait que je mange 600g de lentilles par jour, ce qui est une plâtrée énorme! Je ne peux pas! Je sais qu’íl faut varier les sources de protéines dans la journée, mas je prends volontairement l’exemple de ne manger que des lentilles puisque c’est une des légumineuses les plus riches en protéines, et cela me semble impossible d’avoir chaque jour 48 g de protéines sans des portions énormes.
    Si je me trompe, si j’ai mal compris les chiffres, je m’excuse et vous remercie d’avance de me corriger et d’éclairer ma lanterne, car ce sujet me stresse un peu, Merci!!

  2. Et ce n’est pas pour rien qu’on trouve par ci par là la phrase : mangez au moins 5 fruits et légumes par jour ! Vous avez raison, les légumes sont bons pour la santé. Il faut seulement savoir gérer les menus et c’est tout. Et merci de nous avoir expliquer le B.A.BA du végétarisme.

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